Chez Luxinvia, le questionnement entre mythes et réalités nous intéresse beaucoup. La carte (objective) et le territoire (le vécu des habitants) sont parfois deux réalités différentes. Et il peut y avoir plusieurs réels (ressentis) d’une même réalité (objective).
Si le frein au leadership féminin trouve sa source dans une série de stéréotypes et de biais inconscients qui influencent aussi bien les femmes elles-mêmes que leur environnement professionnel alors on peut tenter de déconstruire ensemble ces idées reçues pour remettre en lumière les vrais enjeux.
Des stéréotypes persistants soutenus par des croyances limitantes
Malgré des avancées substantielles, certaines idées reçues peuvent continuer de peser sur l’accès des femmes aux postes de direction :
- “Les femmes manqueraient d’autorité”. Cette croyance porte en elle une autre croyance tout aussi limitante, à savoir que l’autorité ne s’illustre que dans un leadership directif. Il existe d’autres styles, par exemple d’influence, et des leaderships plus collaboratifs ou persuasifs tout aussi efficaces. Une certaine forme de flexibilité dans le leadership qui s’adapte aux collaborateurs et aux situations s’avère souvent un grand atout dans un environnement VUCA.
- “Elles seraient moins ambitieuses”. Pour travailler très majoritairement avec des dirigeants et des managers des deux sexes, je n’ai pas l’impression que les femmes sont moins ambitieuses que les hommes ; elles l’expriment parfois différemment. Elles évoluent aussi dans un monde qui les pousse parfois à l’autocensure.
- “Elles ne voudraient pas de responsabilités”. Ce n’est pas une question de volonté, mais d’opportunités et de reconnaissance des compétences. Pour accélérer l’accession de femmes aux postes de direction, Schneider Electric a mis en place un programme de mentorat. Karine, Directrice de la Transformation Digitale chez Schneider Electric, témoigne : « Lorsque j’ai commencé ma carrière, je voyais peu de femmes à des postes de direction. Grâce au programme de mentorat mis en place par l’entreprise, j’ai pu bénéficier des conseils de dirigeantes expérimentées. Aujourd’hui, je rends la pareille en accompagnant d’autres talents féminins. Le réseau interne de femmes leaders a été clé dans ma progression. »[1]
L’impact des biais inconscients sur les décisions managériales
Les biais cognitifs influencent les recrutements et promotions, parfois sans que l’on en ait conscience :
- Le biais de similarité : on recrute et promeut ceux qui nous ressemblent… Or, les Comex restent majoritairement masculins. En 2022, les femmes représentent 4 salariées sur 10 dans les entreprises du CAC 40 mais à peine plus de 2 dans le COMEX où elles se concentrent dans les fonctions de direction RH, RSE, communication et juridique.
- Le biais de performance : les hommes montrent davantage de qualité de compétitivité ce qui crée un halo de performance et favorise une évaluation de leur potentiel. Les femmes montrent davantage de qualité d’empathie et sont moins motivées par leur situation personnelle ce qui favorise une évaluation sur leurs réalisations passées, conduisant alors à devoir prouver deux fois plus leur légitimité. Sans que rien ne vienne étayer cela, la gentillesse alimente ce biais et peut nuire à la perception de performance, ceci valant du reste autant pour une femme « gentille » que pour un homme « gentil ».
- Le biais du double standard ou du « 2 poids, 2 mesures » : un homme assertif pourrait être vu comme un leader alors qu’une femme assertive pourrait être jugée autoritaire voire agressive.
Côté chiffres, où en est-on en 2025 ?
Les postes de direction générale sont occupés par des femmes dans 20% des cas en Europe. La politique des quotas joue son rôle. Selon le baromètre IFA[2], la part des femmes dans les CA des entreprises du CAC 40 en France est passée de 15.3% en 2010 à 47.3% en 2025. La situation progresse donc très sensiblement.
Les écarts de rémunération persistent tout en se réduisant. En 30 ans, l’écart salarial a diminué d’un tiers en France entre les hommes et les femmes. Le revenu salarial des femmes reste toujours inférieur de 22%. Corrigé du temps de travail (les femmes travaillent davantage à temps partiel), l’écart se réduit à 14%. À emploi et temps de travail égal dans un même établissement, l’écart s’établit à 4%[3].
Déconstruire ces freins ?
Voici quelques pistes de réflexion pour donner à tous les talents féminins leur place dans la gouvernance des organisations.
En amont, la formation initiale doit mobiliser les jeunes, les familles, l’éducation nationale… ! Il demeure une répartition encore trop genrée des professions qui fait que les femmes accèdent moins que les hommes aux postes les mieux rémunérés. Par exemple, en faisant bouger les normes culturelles pour valoriser des modèles féminins inspirants… Par exemple encore, en favorisant des styles de leadership diversifiés notamment pour inciter des jeunes filles à s’orienter vers d’autres parcours de formation réputés plus masculins.
Ensuite, la sensibilisation des décideurs aux biais inconscients dans les recrutements et les promotions s’avère un outil de conscientisation. La diversité des points de vue est une forme de garantie pour tendre à plus d’équité.
Dans les entreprises ou en dehors, le développement de programme de mentoring et de sponsoring permettant aux femmes d’accéder à des opportunités stratégiques représente une piste intéressante. Chez Luxinvia, nous prenons notre part avec une offre sororelle sur mesure de « personnal branding ».
De notre point de vue, il est souhaitable que ces modèles soient modélisants en eux-mêmes. Cela fait sens de les construire ensemble, femmes et hommes, et d’une façon inclusive. Des programmes exclusifs pourraient avoir des impacts certes plus immédiats mais des effets rebonds potentiellement contreproductifs.
[1] Rapport de diversité et inclusion de Schneider Electric.Témoignages issus de publications LinkedIn et d’interviews de dirigeantes chez Schneider
[2] Baromètre IFA – Ethics & Boards cité dans l’Express du 27/02/2025
[3] Insee Focus n°349 du 4/03/2025